Lien vers le “Soy and Cattle Deforestation Monitor” (Observatoire de la déforestation liée au soja et au boeuf incluant les résultats de l’outil de suivi et du nouveau tableau)
Lien vers le nouveau rapport “Rapid Response #4 Soy”
Alors que l’avenir des écosystèmes naturels du Brésil est en jeu lors du sommet du Mercosur, qui se tiendra les 5 et 6 décembre prochain, l’ONG internationale Mighty Earth publie un classement de l’impact sur la déforestation des principales entreprises commercialisant du soja et du bœuf au Brésil et son nouveau Rapid Response soja.
- L’analyse de 10 entreprises selon le Soy & Cattle Deforestation Tracker, nouvel outil de suivi de la deforestation liée au soja et au boeuf de l’ONG Mighty Earth, révèle une deforestation associée équivalente à plus de trente fois la superficie de Paris en Amazonie, dans le biome du Cerrado et du Pantanal.
- Parallèlement au classement, le nouveau rapport de l’ONG sur le soja “Rapid Response #4 Soy” révèle que le Cerrado se meurt, la déforestation due au soja dans ce biome vulnérable étant trois fois plus importante que celle de l’Amazonie.
- L’Europe est complice de la destruction des biomes vulnérables du Brésil, les importations de soja ayant augmenté de plus de 6 % en 2024. Cette tendance pourra s’accélérer si l’accord de libre-échange entre l’Europe et le Mercosur est signé. Cela est très préoccupant avec une réglementation déforestation Européenne repoussée d’un an et un moratoire du soja Amazonien attaqué.
Les entreprises Bunge, Cargill et JBS sont les plus mal classé en matière de déforestation selon le “Soy & Cattle Deforestation Tracker” de Mighty Earth. Ce nouvel outil classe 10 des plus grandes entreprises mondiales de soja et de viande de boeuf en fonction de leurs liens avec des cas de déforestation dans des biomes brésiliens menacés, tels que l’Amazonie, le Cerrado et le Pantanal. Les entreprises américaines Bunge et Cargill sont les négociants en soja les plus impliqués dans la déforestation, tandis que le géant brésilien du bœuf JBS est la pire des entreprises de viande de bœuf (achat, abattage et transformation).
Soy & Cattle Deforestation Tracker
S’appuyant sur une base de données de 172 cas récents signalés par AidEnvironment et Mighty Earth, le Soy & Cattle Deforestation Tracker établit un lien entre 10 grands négociants en soja (ADM, ALZ, Amaggi, Bunge, Cargill, Cofco et LDC) et viande de bœuf (JBS, Marfrig et Minerva) et 330 296 hectares de déforestation récente et de dégradation des terres dans les trois biomes au cours des deux dernières années (de février 2022 à juillet 2024).
- Bunge, classée pire entreprise en matière de déforestation, est potentiellement liée à 224 181 hectares de déforestation, dont 1/4 dans des zones protégées.
- Cargill est probablement liée à plus de 133 256 hectares, 85 % de cette déforestation ayant lieu dans la savane Cerrado.
- JBS est l’un des principaux moteurs de la déforestation dans son secteur de la viande de boeuf avec des liens possibles avec plus de 118 310 hectares de déforestation, dont les 3/4 ont lieu en Amazonie.
Les nouvelles données montrent que, loin d’atteindre les objectifs fixés par les entreprises pour être exemptes de déforestation et de conversion (Deforestation and Conversion-Free – DCF) d’ici à 2025, l’industrie de la viande continue de mener une guerre contre la nature, la déforestation augmentant à un rythme alarmant. 1/3 de ce déboisement a eu lieu dans des zones protégées, ce qui le rend potentiellement illégal au regard de la loi brésilienne, et 66 129 hectares ont eu lieu à proximité ou en bordure de terres indigènes. Les données utilisées pour le rapport de suivi ne représentent qu’un instantané des destructions massives qui ont lieu au Brésil et qui sont en réalité bien plus importantes.
Lancement du Scorecard, un outil d’évaluation annuel de la déforestation liée au soja et au boeuf
Parallèlement à l’outil de suivi (Tracker), Mighty Earth lance un outil d’évaluation (Scorecard) annuel de son programme de surveillance de la deforestation Rapid Response et des politiques de ces géants des protéines. Son objectif est d’évaluer la manière dont les entreprises ont répondu aux alertes de déforestation de Mighty Earth au cours de l’année écoulée et met en évidence l’inaction et le manque de responsabilité des négociants en soja et des entreprises de viande dans la lutte contre la déforestation au sein de leurs chaînes d’approvisionnement. L’évaluation porte sur quatre catégories : niveau de réponse, transparence, action et politique zéro déforestation et conversion. JBS, le plus mal placé, n’a obtenu que 10/100, Cargill 11/100 et Bunge qui a le plus de liens avec la déforestation seulement 31/100.
LDC arrive en tête du tableau de scores avec 42 points sur 100 et dispose de la politique la mieux notée en matière de déforestation et de conversion zéro, tandis qu’ADM, en deuxième position, est la seule entreprise à publier ces cas de déforestation dans un registre public de plaintes.
Joao Gonçalves, directeur de Mighty Earth au Brésil, précise:
« Le Brésil ayant connu cette année incendies de forêt, inondations et sécheresse records, les négociants en soja et en boeuf doivent de toute urgence cesser de s’approvisionner auprès d’exploitations impliquées dans la déforestation, ce qui alimente le réchauffement climatique et aggrave la crise du climat et de la nature. »
Boris Patentreger, directeur de Mighty Earth en France, alerte :
« Alors que le traité de libre-échange entre le Mercosur et l’Union Européenne pourrait être signé prochainement, les entreprises en lien avec le bœuf et soja brésilien devraient montrer que la déforestation n’est plus dans leur chaine d’approvisionnement. Elles sont en réalité toujours incapables d’être transparentes contrairement à d’autres secteurs. Il ne suffit pas d’identifier la déforestation, il faut l’arrêter et bloquer les fournisseurs non conformes.”
Le Cerrado assiégé
Lancé en même temps que le Tracker et le Scorecard, le nouveau rapport de surveillance Rapid Response #4 Soy de Mighty Earth révèle que les taux de déforestation liés au soja sont presque trois fois plus élevés dans le Cerrado que chez son voisin, l’Amazonie. L’analyse montre que 25 207 hectares d’alertes de déforestation liées au soja ont été enregistrés dans le Cerrado, de janvier à avril 2024, contre 8 782 hectares d’alertes de déforestation et de dégradation liées au soja en Amazonie au cours de la même période.
Abritant 5 % de la biodiversité mondiale, le Cerrado est l’un des biomes les plus menacés de la planète. Peu protégé par la législation nationale ou internationale, il est encore plus vulnérable à un effondrement de l’écosystème. Plus de la moitié du Cerrado a disparu, accaparé par l’industrie de la viande pour faire paître le bétail et cultiver du soja destiné à nourrir les élevages intensifs d’Europe, de Chine et d’ailleurs.
7 exploitations de soja ont été identifiées où des alertes à la déforestation et à la dégradation se sont produites entre janvier et avril de cette année, dont 5 dans le Cerrado. Elles totalisent 11 768 hectares dans des exploitations précédemment plantées de soja et situées dans un rayon de 50 kilomètres autour de silos à grains appartenant à sept négociants mondiaux en grains : ADM, ALZ Grãos, Amaggi, Bunge, Cargill, Cofco et LDC. L’analyse a révélé 7 383 hectares de déforestation récente dans une seule exploitation située dans une zone de conservation extrêmement prioritaire du Cerrado, avec un lien probable avec les négociants en soja Bunge et ALZ Grãos.
L’Europe complice
L’Europe est un marché clé pour le soja brésilien, avec des exportations de soja et de tourteaux de soja en hausse de 6,3 % de janvier à septembre 2024 par rapport à la même période en 2023. Les exportations de soja vers la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Espagne et le Royaume-Uni ont augmenté de 20 % au cours des 9 premiers mois de cette année par rapport à la même période l’année dernière. Les exportations brésiliennes de soja et de farine de soja vers l’Espagne ont augmenté de 39 % cette année par rapport aux chiffres de l’année dernière.
Les entreprises françaises signataires du manifeste soja ont été sollicité pour investiguer sur leur chaine d’approvisionnement en lien avec ces alertes et 6 entreprises ont répondu à Mighty Earth et ont entrepris des actions pour contacter les négociants de soja pour les pousser à agir. Les signataires de ce manifeste ont aussi soutenu publiquement le moratoire du soja Amazonien.
Mariana Gameiro, chargé du progamme Rapid response à Mighty Earth precise :
« Le Cerrado est assiégé, la déforestation due au soja étant presque trois fois plus élevée dans ce paysage menacé que dans son voisin, l’Amazonie. Les récentes attaques contre le moratoire sur le soja amazonien et le règlement de l’UE sur la déforestation augmentent le risque de l’arrivée d’un point de bascule sur les biomes naturels au Brésil. ».
« Le soja brésilien continue d’affluer en Europe. Les détaillants européens et les industries de la viande, des produits laitiers et de l’alimentation animale doivent prendre des mesures immédiates pour rompre les liens commerciaux avec les principaux fournisseurs de soja liés à la déforestation ».
Le Tracker, le Scorecard et le rapport Rapid Response #4 Soy sont publiés au moment où la protection des forêts fait l’objet de nouvelles attaques avec des menaces politiques contre le moratoire sur le soja amazonien au Brésil et le règlement de l’Union européenne sur la déforestation, les parlementaires européens ayant récemment voté pour retarder la législation d’un an.