Déclaration d’Etelle Higonnet, Directrice Afrique de Mighty Earth
BONN, Allemagne, le 16 novembre — L’industrie du chocolat a décidé aujourd’hui de mettre fin à la déforestation liée à la culture du cacao en Afrique de l’Ouest. Après avoir connu un passé amer, les forêts d’Afrique peuvent désormais aspirer à des lendemains meilleurs.
En promettant de mettre un terme à la destruction de ces forêts et de restaurer les zones précédemment détruites, un véritable avenir pour la faune et la flore d’Afrique de l’Ouest se dessine.
Cette annonce intervient après l’enquête de Mighty Earth sur l’industrie du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana, qui a montré que la production de cacao entraînait une déforestation massive, notamment dans les aires protégées comme les parcs nationaux ou forêts classes, qui constituent parmi les dermiers habitats ouest africains pour les chimpanzés et éléphants de forêt.
Le pacte signé aujourd’hui n’est que le début d’un long chemin à parcourir, car plus de 90 % des forêts de Côte d’Ivoire ont disparu et 7 000 kilomètres carrés de forêts ont été défrichés au Ghana entre 2001 et 2014. Les éléphants, les chimpanzés et d’autres espèces de singes moins connues, mais non moins remarquables, ont été contraints par l’activité liée à l’industrie du chocolat de se réfugier dans de minuscules parcelles résiduelles de forêt. La tâche sera en effet ardue avant que les consommateurs puissent à nouveau manger en toute bonne conscience le chocolat de leurs marques préférées. Mais ces consommateurs et les Africains de l’Ouest savent au moins que le secteur du chocolat et leurs gouvernements s’attaquent enfin de manière sérieuse au problème.
Le pacte signé aujourd’hui est l’accomplissement d’une croisade menée par un véritable héros des forêts, le prince de Galles. L’engagement personnel sincère et de longue date du prince Charles en faveur de la préservation des forêts tropicales s’est traduit par cette initiative dont on se souviendra peut-être longtemps comme le moment à partir duquel les forêts d’Afrique de l’Ouest ont commencé à repousser.
Cette avancée est bien sûr le fruit d’un travail d’équipe. Un projet de cette envergure n’aurait tout simplement pas pu voir le jour sans la participation des gouvernements ghanéen et ivoirien, la créativité et les efforts sans faille de la fondation Sustainable Trade Initiative (IDH) et de la Fondation mondiale du cacao . Le secteur du chocolat a entendu les centaines de milliers de consommateurs à travers le monde qui veulent pouvoir s’adonner à leur plaisir coupable sans arrière-pensées. Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest ont quant à eux écouté leurs citoyens qui réclament la protection et la restauration de leur patrimoine naturel. Merci à la Fondation Arcus dont le soutien a rendu possible ce travail.
Mais ces bonnes intentions doivent maintenant se traduire concrètement et rapidement sur le terrain. Les entreprises hautement lucratives qui pendant des années se sont approvisionnées en cacao dans des parcs nationaux et des aires protégées doivent notamment contribuer financièrement et de manière substantielle à la restauration de ces zones précieuses. Pour ce secteur dont le chiffre d’affaires est estimé à 100 milliards de dollars par an, adopter ces bonnes pratiques ne représenterait pour chaque entreprise qu’un pour cent de son revenu annuel. Nous veillerons à ce que cela se produise.
Comme prochaine étape, l’industrie du chocolat doit annoncer qu’elle étendra son engagement pour un cacao « zéro déforestation » à la production de chocolat dans le reste du monde. Que ce secteur prenne des mesures pour protéger l’habitat des chimpanzés en Côte d’Ivoire est une initiative formidable. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’un consommateur doive se sentir responsable de la mort d’un orang-outan en Indonésie ou d’un paresseux au Pérou en mangeant une tablette de chocolat.
Enfin, l’utilisation généralisée de pesticides par la filière du cacao a considérablement dégradé la qualité des cours d’eau et menacé la santé des communautés locales. Ce secteur devra également renforcer son engagement auprès des travailleurs et des communautés qui vivent à proximité des plantations de cacao en interdisant l’utilisation de pesticides dangereux et en adoptant rapidement des systèmes de cultures biologiques et sous ombrage.